Bénin : Boni Yayi reprend l’avantage
En 2010, Les ténors de l’opposition béninoise ont tout essayé pour rendre ingouvernable le pays à Boni Yayi, déstabiliser son leadership, voire le faire partir du pouvoir avant la tenue du scrutin présidentiel de mars 2011. Affaire Dangnivo, instrumentalisation des syndicalistes et des lobbies de la société civile, blocage des activités parlementaires, tentatives d’abrogation de la loi sur la LEPI ou encore contrôle de la CENA, l’opposition a fait feu de tous bois. Cependant, contre toute attente, l’actuel chef de l’Etat, Boni Yayi -que l’on pensait en perte de vitesse- est en passe de se replacer au cœur de l’échiquier politique béninois.
Premier changement notable, la bataille autour du contrôle de la très stratégique Commission Electorale Nationale Autonome (CENA), où l’ex-banquier a démontré ses talents redoutables de tacticien en réussissant à semer la zizanie dans les rangs de l’opposition. En effet, si la décision de la Cour constitutionnelle rendant obligatoire la loi sur la réforme du système électoral (LEPI) pour les élections présidentielles et législatives de 2011 avait déjà divisé l’opposition, cette dernière gardait tout de même un dernier espoir : contrôler la Commission Electorale Nationale Autonome (CENA), instance chargée d’organiser les scrutins des 27 février et 17 avril 2011. Techniquement, l’opposition disposant d’une majorité confortable à l’Assemblée nationale avait les cartes en main pour s’adjuger la CENA 2011. Hélas, faute de stratégie et de cohésion dans ses rangs, elle est aujourd’hui en passe de perdre cette bataille. Avec 49 députés contre 34 pour la mouvance (députés fidèles à Yayi), l’opposition n’a pu arracher que 6 sièges pour ses représentants à la CENA 2011 sur les 9 qu’il revenait au Parlement de désigner. La mouvance, coachée en sous main par un Boni Yayi à la pugnacité retrouvée, a réussi à casser les calculs de l’opposition en enlevant à celle-ci un de ses membres en la personne du député Joachim Dahissiho du G13. La CENA comportant 11 membres, les deux sièges restants seront pourvus respectivement par le gouvernement et la société civile. Selon des rumeurs persistantes à Cotonou, le représentant de la société civile qui est déjà désigné, Rigobert Chacha, serait assez proche de Yayi. Sur la base de cette considération et avec le représentant du gouvernement à la CENA, la mouvance présidentielle afficherait au compteur 6 sympathisants sur les 11 de l’institution contre cinq pour l’opposition. Ceci laisse présager que le Président de la CENA serait une personnalité proche de la majorité présidentielle, constituant ainsi une véritable surprise. Il ya à peine un mois, les observateurs de la vie politique béninoise estimaient que l’entrée dans le jeu politique de Abdoulaye Bio Tchané, patron de la Banque Ouest Africaine de Développement, risquait de bouleverser la donne pour les présidentielles. Or, Bio Tchané, surnommé ABT, qui avait été vendu comme un « Yayi Boni Jeune » -le président actuel a lui aussi été à la tête de la BOAD- , apparaît plutôt maintenant comme un « Yayi Boni de contrefaçon » selon les mauvaises langues à Cotonou.
En effet, la faible capacité de mobilisation du nouveau venu, ainsi que son programme assez similaire à celui de Yayi, a reconfiguré l’élection pour la magistrature suprême en un match plus classique entre l’opposant « historique » Adrien Houngbedji (qui se présente pour la cinquième fois) et le Président sortant, Thomas Boni Yayi.