Des cheminots marocains gagnent leur procès pour discrimination en France
La Société Nationale des Chemins de Fer français (SNCF) a été condamnée en appel pour discrimination envers des cheminots marocains, recrutés dans les années 1970, a annoncé mercredi à Paris, leur avocat, Me Clélie Lesquen-Jonas.
Plus de 800 cheminots «aptes à tout», aujourd’hui «usés», ont obtenu reconnaissance d’un «préjudice moral». Il s’agit d’«un grand soulagement et une grande satisfaction», a commenté l’avocat qui a pris connaissance d’une partie des décisions de la justice française.
Lors du réexamen du dossier en mai 2017, quelques anciens salariés autorisés à s’exprimer au nom des autres ont déclaré être présents au tribunal «pour défendre notre honneur». «La SNCF a profité de nous», a ajouté l’un deux, ému aux larmes en évoquant le moment où il a découvert que le montant de sa retraite était inférieur à celui de ses collègues français.
«Nous avons obtenu en plus des dommages et intérêts pour préjudice moral», a déclaré mercredi Me Clélie de Lesquen-Jonas, à la cour d’appel de Paris, où une centaine d’anciens salariés s’étaient spécialement déplacés pour connaître le verdict de la Cour.
Dans une déclaration à la presse, la SNCF dit avoir pris «acte de cette décision de justice» et «se réserve le droit d’un éventuel pourvoi en cassation».
En première instance, en septembre 2015, la plupart des « Chibanis » (cheveux blancs en arabe) avaient obtenu gain de cause. Moins d’une dizaine de dossiers avaient été rejetés.
Mais l’entreprise française des chemins de fer avait fait appel de cette décision qui la condamnait à plus de 170 millions d’euros de dommages et intérêts, alors que les « Chibanis » en demandaient 628 millions d’euros en tout pour différents préjudices (carrière, retraite, formation, accès aux soins, santé, etc.).
En manque de main d’œuvre, la SNCF avait pu embaucher des marocains à grande échelle pendant plusieurs années en vertu d’une convention signée en 1963 entre la France et le royaume fraîchement indépendant. Environ 2.000 recrues marocaines ont été recensées par l’association des Chibanis.
Le groupe public ferroviaire français a toujours nié une «quelconque politique discriminatoire à l’encontre des travailleurs marocains», estimant avoir constamment «veillé à l’égalité de traitement de tous ses agents dans l’environnement réglementaire décidé par les pouvoirs publics».