Égypte : L’Etat veut réglementer la couverture médiatique des attentats
Si la nouvelle loi égyptienne antiterroriste est approuvée, l’Egypte pourra prendre des mesures légales contre les journalistes qui livrent des bilans d’attentats jihadistes contradictoires avec ceux contenus dans les communiqués officiels.
La loi devrait être promulguée par le président Abdel Fattah al-Sissi dans les prochains jours, le gouvernement ayant déjà approuvé le projet de loi, dont le contenu a été diffusé dans plusieurs journaux du pays.
L’article 33 prévoit au moins deux ans de prison pour ceux qui rapportent de fausses informations sur des attaques terroristes qui contredisent les communiqués officiels.
Deux responsables, dont le ministre de la Justice, Ahmed al-Zind, ont confirmé l’existence de cet article.
Selon Ahmed al-Zind, ministre de la justice qui a confirmé l’existence de cet article, la loi est en partie née en raison de la couverture médiatique de l’attaque le 1er juillet dans le Sinaï du groupe jihadiste Etat islamique (EI) contre des soldats.
Le porte-parole de l’armée avait alors affirmé que 21 soldats avaient été tués dans les combats. Des responsables de la sécurité avaient quant à eux parlé de dizaines de soldats morts.
Le jour de l’attaque dans le Sinaï, certains sites (d’information) ont parlé de 17 soldats tués, puis 25, puis 40, puis 100, a déclaré le ministre de la Justice, qui estime que cette couverture a affecté le moral du pays.
Pour lui, le gouvernement a le devoir de protéger les citoyens des fausses informations, espérant que cette nouvelle loi ne soit pas interprétée comme une atteinte à la liberté de la presse.
Lors d’une visite surprise dans le Sinaï samedi, le président Al Sissi avait également critiqué la couverture des médias qui ont présenté une fausse image de l’Egypte.
Cependant, même si la grande majorité des médias soutiennent le gouvernement, le syndicat des journalistes dénonce ce projet de loi, y voyant de nouvelles restrictions pour la liberté de la presse.
« C’est un article dangereux qui viole la constitution, cela viole le droit du journaliste à rechercher une information de différentes sources, et autorise l’exécutif à agir en tant que censeur », a indiqué le syndicat dans un communiqué.
Depuis deux ans, le gouvernement est accusé de museler la liberté de la presse.
Selon le Committee to Protect Journalists (CPJ), au moins 18 journalistes, essentiellement accusés d’appartenir aux Frères musulmans, dont est issu Morsi, étaient emprisonnés au 1er juin en Egypte.
Il s’agit, selon l’ONG, d’un nombre record depuis que le CPJ a commencé à les recenser en 1990.
Deux journalistes d’Al-Jazeera, dont le Canadien Mohamed Fahmy, sont actuellement jugés pour leur couverture de la répression. La chaîne qatarie est accusée par les autorités d’Egypte, de soutenir les Frères musulmans.
Un troisième journaliste, l’Australien Peter Greste, a été expulsé. Les trois journalistes ont été dans un premier temps condamnés jusqu’à dix ans de prison mais ont gagné le droit d’être rejugés.